Une bonne partie des ingénieurs qui sont passés par les ESN (ex-SSII) le savent bien, une augmentation de salaire s’obtient surtout en changeant de boite. Ce qui explique en partie le taux de turnover très élevé, que les dirigeants disent déplorer. Hypocrisie, le turnover est un outil, la non-augmentation est un outil. Les salaires bas sont une manne de bénéfices. Dans certaines ESN le bénéfices terminent d’ailleurs intégralement dans la poche des quelques actionnaires, dont les PDG font évidemment partie…
Contraindre les salaires dans la tranche inférieure à 2,5 SMIC
Souvenons nous du fameux CICE (Crédit d’Impôts Compétitivité Emploi), remplacé par un allègement de cotisations sociales en 2019 : « Accessible à toutes les entreprises employant des salariés, le CICE permet de bénéficier d’une économie d’impôt substantielle. En 2018, elle équivaut à 6 % de la masse salariale (7 % depuis 2014), hors salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC. En 2019, le CICE sera supprimé et remplacé par un allégement de cotisations patronales sur les bas salaires. » (source https://www.economie.gouv.fr/le-cice-cest-quoi)
« Allègement de cotisations patronales sur les bas salaires« . Nous avons l’honneur de t’apprendre que si, en ce mois de Septembre 2023, ton salaire mensuel brut est inférieur à 2,5 x 1747 € = 4367 €, pour 35h bien sûr, tu fais partie des bas salaires de ce pays (source Service Public) (NB: en réalité le calcul est annualisé. Pour info, 2,5 x SMIC Annuel brut 2023 = 52035 €).
Eh oui, il y a bien des ingénieurs, des BAC + 5, et d’autres qui entrent dans la catégorie des « bas salaires ».
Au titre donc de l’allègement, l’employeur voit sa cotisation pour l’assurance maladie exonérée de 6 points. Pas de 6%, non, 6 points. Cette cotisation patronale passe donc de 13% à 7%. Petit calcul, pour un(e) salarié(e) à 3500 € brut, l’employeur économise 210€ par mois, et donc 2520 euros par an !
Interlude, amusant ou pas… Cet allègement réduit les revenus de l’assurance maladie du coup. En réalité, l’état compense ce manque à gagner (« comble le déficit » aiment dire certains…). Et avec quel argent ? Avec tes impôts, pardi… Le chemin entre tes impôts et les dividendes prend doucement forme. Mais ça, c’est un sujet politique…
Alors à ton avis, combien de tes collègues sont payés en dessous de 2,5 x SMIC ?
D’après les informations rapportées ici par le syndicat patronal Syntec, on peut valablement estimer le salaire moyen dans la branche à 4500 euros brut mensuel. Le salaire médian (qui est le salaire maxi des premiers 50% de l’effectif) doit se situer non loin.
Ainsi, dans une ESN de 3000 salarié(e)s, dont la répartition des salaires correspondrait à la statistique de la branche professionnelle, et qui pratiquerait un salaire brut annuel minimum de 40000€, l’entreprise coûte à l’état entre 2400 x 3000 = 7 200 000€, et 3120 x 3000 = 9 360 000€.
Pour information, la branche professionnelle des bureaux d’études techniques (dite Syntec) emploie environ 1 millions de salarié(e)s. Ce qui permet d’estimer que l’allègement pèse au moins 2,4 milliards d’euros. Rien que pour la branche.
En tout cas, les millions d’euros économisés par notre ESN de 3000 salariés viennent grossir son résultat opérationnel, donc ses bénéfices.
Roulement de tambour : cette partie de bénéfices « subventionnée » contribuent-elle à améliorer la vie dans l’entreprise ? Si elle part intégralement en dividendes, certainement pas.
Soutenez nous, rejoignez nous, pour parvenir ensemble à faire sorte que ces « subventions » soient correctement utilisées !